Alessandra

professeur de Zumba et militante associative

46 ans

Je ne suis née de travers ! Je suis née au Brésil pendant le régime de la dictature militaire au début des années 70. Ne sortez pas les mouchoirs, je le vis très bien, mais ma mère ne souhaitait pas avoir d’enfant donc elle a pris des herbes pour avorter, ce qui explique que je sois arrivée de travers au moment de l’accouchement.

Mon objectif : l'émancipation du féminin par le sport.

Je suis née dans un milieu pauvre et à 9 ans je faisais du porte à porte pour vendre des montres. Je ne peux pas dire qu’à l’époque le sport était un plaisir pour moi parce qu’il était imposé et encadré par les militaires et puis j’avais pas mal de petits pépins de santé. J’étais asthmatique et réellement de travers. Mais le sport m’a rapidement appris l’endurance et la résistance. De plus, je me suis appuyée sur un groupe de femmes qui m’ont transmis les vraies valeurs du sport comme le collectif et l’inclusion. J’ai fait du volley, de la natation, de l’athlétisme, de la capoeira. De quoi, sans doute, me maintenir à flot alors que l’horizon au Brésil était sans perspective.

Comme je dis souvent à mes élèves, la vie est comme une cession de squats, plus tu descends bas plus tu remontes haut ! C’est en suivant un Français rencontré au Brésil que je suis arrivée en France, à l’âge de 24 ans, en laissant derrière moi 3 enfants qui m’ont rejoint plus tard. C’était très difficile mais ce fut comme une fugue, comme sortir de l’eau pour reprendre un peu d’oxygène. Je suis arrivée à Lille et j’ai commencé à travailler avec celui qui est devenu mon mari et le père de mon quatrième enfant. Nous nous sommes par la suite séparés, et c’est le sport m’a permis de m’en sortir et de transmettre les valeurs d’émancipation qui me tiennent à cœur.

J’ai commencé à donner des cours de Zumba, un très bon moyen de se dépenser et de faire du sport sans s’en apercevoir. La Zumba, c’est le mouvement sans se prendre la tête, c’est exprimer librement sa vibration sur des rythmes multiples sans se soucier que l’on soit petit, gros, grand ou maigre. Cela m’a amené vers l’encadrement, j’ai passé plusieurs diplômes d’animation sportive tout en militant pour la cause des femmes. J’ai mis en place des cours qui leur sont réservées parce que certaines avaient besoin de reprendre confiance en elles loin du regard des hommes. C’est une forme d’empowerment par le sport. Dans mon cours, on crie, on se libère avant d’envisager d’autres activités sportives comme la marche nordique ou le vélo. Et puis mon idée est de réunir sur Lille des personnes de tous les milieux, de toutes les origines. Hier, on avait par exemple une petite fille de 9 ans, une grand mère de 64 ans, de jeunes femmes qui sont dans de grandes écoles, à l’EDHEC ou Sciences Po, d’autres qui font dans l’associatif et qui vivent dans les quartiers populaires. Pour moi le sport est là aussi pour créer du lien social. J’ai envie que toutes femmes, d’où qu’elles viennent, quel que soit leur physique ou leurs origines, s’émancipent et prennent leur place dans l’espace public par le sport. Travailler sur le mouvement c’est se donner l’occasion de révéler qui l’on est et pouvoir devenir maître de son existence. Quel merveilleux destin que d’être soi !

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